Grenoble, correspondance.
«Cette journée-là, je ne suis pas près de l'oublier...» Depuis l'âge de 18 ans, Robert Buscarini, 27 ans, est ouvrier à l'usine pétrochimique Atofina de Brignoud, bourgade industrielle à une quinzaine de kilomètres de Grenoble, dans la vallée du Grésivaudan. Le 25 janvier dernier, il a parcouru avec plus de 2 000 manifestants les rues du bourg pour dénoncer la fermeture prochaine, par Atofina branche chimie du groupe TotalFinaElf, de son usine créée en 1852. A ses côtés, une bonne partie des 169 salariés actuels et des retraités de l'usine, leurs familles, des habitants et élus des communes environnantes. «La pétrochimie, comme on appelle l'usine ici, c'était tout pour nous», explique Robert. Son père et ses oncles ont travaillé là, après le grand-père venu d'Italie au début du siècle, promesse d'embauche et de logement en poche. «On est comme les mineurs. On l'aime cette usine, même si c'est malheureux à dire. Mon père et mes oncles, je ne les ai jamais entendus en parler en mal. Et pourtant, l'un d'entre eux est mort en 1997 d'une maladie professionnelle... Du jour au lendemain, des dirigeants ont décidé de nous rayer de la carte. On est des pions.»
Ce 25 janvier, devant l'église proche des silos de l'usine, la manifestation s'est figée le temps d'une minute de silence devant le corbillard d'un retraité de la pétrochimie. Un ouvrier d'origine italienne comme tant d'autres sur cette rive gauche industrieuse de l'Isère. Ils sont venus en masse, dès