Le système de notations des guides «est difficile à vivre parce que vous faites votre métier avec votre coeur», confie le chef du Grand Véfour, Guy Martin. «On dit que vous êtes l'un des meilleurs, puis, subitement, du jour au lendemain, vous ne l'êtes plus.» Dénoncés aujourd'hui comme les responsables, sinon les coupables, de la mort d'un des plus grands chefs français, les guides gastronomiques sont dominés par la figure du Michelin. D'abord par les chiffres : il annonce 400 000 exemplaires vendus en France, et 150 000 à l'étranger pour l'édition 2002, quand la plupart des autres guides se diffusent avec peine à quelques milliers d'exemplaires.
Ce qui fait la force du Guide rouge est l'importance de ses moyens de contrôle, qui ont longtemps bénéficié de l'appui du groupe de pneumatiques. Des inspections anonymes permettent de classer l'établissement, en accordant autant d'importance au confort ce qui lui a été souvent reproché qu'au contenu de l'assiette.
Le Guide rouge, plus que centenaire, est souvent attaqué pour ses classements aléatoires. En effet, pour les meilleurs restaurants interviennent manifestement des corrections à caractère plus politique : donner un coup de pouce à un jeune ou à une ville un peu déshéritée, ne pas donner trop d'étoiles à une région, favoriser une maison indépendante, rabattre le caquet d'un chef trop prétentieux... Les chefs vivent d'autant plus dans l'angoisse que les jugements du Michelin ne sont jamais motivés. Mais ils peuvent discute