Psychologue du travail au Conservatoire national des arts et métiers à Paris, Pascale Molinier vient de publier l'Enigme de la femme active aux éditions Payot & Rivages.
Pourquoi le monde du travail a-t-il une vision si stéréotypée des genres ?
On vit sur l'idée d'une transformation profonde des rapports hommes-femmes. En contrepartie, on s'intéresse peu à ce qui résiste. Or le travail est un des lieux où la résistance à l'évolution des «rôles de sexe» est la plus forte. On y considère en particulier que les femmes seraient plus «relationnelles» et «compréhensives» que les hommes. Et l'on trouve normal qu'elles soient majoritaires dans les métiers centrés sur le souci de l'autre, que ce soit dans les crèches ou sur les plateaux clientèles d'EDF-GDF.
Pourquoi une telle résistance ?
On ne peut pas comprendre cette résistance sans référence aux défenses viriles que les hommes opposent à leur propre souffrance. A la maison comme dans le travail salarié, les hommes se débrouillent pour que les femmes prennent en charge la sphère du rapport à l'autre, à la dépendance, à la maladie, à la souffrance. En se persuadant collectivement que ces tâches sont naturelles aux femmes donc qu'eux-mêmes savent moins bien les faire , les hommes s'en déchargent sans culpabilité. N'étant pas confrontés à la vulnérabilité des autres, ils s'épargnent d'être confrontés à la leur. En bref, ils souffrent moins.
Quelles sont les conséquences de cette «naturalisatio