Noyelles-Godault
envoyée spéciale
Un bouquet d'étincelles orange, des dizaines de déflagrations. Au pied de l'usine Metaleurop occupée, les ouvriers fêtent leur licenciement en jouant avec le feu. Un feu d'artifice avec, en toile de fond, l'usine morte. C'était lundi soir, au bord de la Deûle, le canal qui coule au pied du vieux site de plomb et de zinc, là où on chargeait les péniches. Par centaines de kilos, 200 ouvriers ont jeté des pains de sodium, sorte de pâte à modeler blanche qui explose au contact de l'eau. «Un avertissement», menace un ouvrier avec casque de chantier, lunettes de protection et masque. «Y a pire en stock.»
«Ouaaaaaais !» Le stock ? Six cents tonnes d'acide. Une trentaine de voitures garées au bord de la Deûle. Des badauds venus admirer le spectacle, en famille. «Ouaaaaaais !» Le pont semble s'embraser. Dessous, avec l'écho, on pourrait le croire prêt à s'écrouler. Pollution ? Pas de risque avec le sodium, explique-t-on à la Drire (1). Seul danger : des blessures par brûlure, lors de projections. Un ouvrier a été légèrement brûlé à l'oeil dans l'après-midi.
Des automobilistes klaxonnent à leur passage sur le pont. Excitation chez les ados, qui grimpent sur des tuyaux, des cuves étanches. «Attention, marche pas là, c'est de l'acide !» Une fumée blanche forme un épais brouillard. Un ouvrier à son fils : «Ferme tes yeux, ferme ta bouche.» On aperçoit les gyrophares bleus d'une patrouille de police, sur le pont. La fête est triste. Yves, d'ordinaire bavard,