Jean-Michel, 27 ans, garde les places de parking pour les tournages de film à Paris.
«Je garde du vide. Pendant des heures. Je suis ventouseur. Embauché par la production sur un tournage de film, je suis chargé d'occuper, au fur et à mesure qu'elles se libèrent, les places de stationnement. Si le tournage a lieu la nuit, il faut «ventouser» le jour, et inversement. Plusieurs mètres de parking à réserver pour les camions techniques, ou pour libérer un champ pour la prise de vue. Chaque fois qu'une voiture s'en va, je mets un plot. Puis je surveille pour que personne ne s'y gare. Interdiction de quitter les lieux, tout doit être libre le lendemain.
Je passe mes journées à attendre. Sur le trottoir ou dans le véhicule. Je vis à l'heure du quartier où je suis. Le matin, je vois les gens partir stressés au boulot, puis revenir plus détendus le soir. Moi, entre-temps, je n'ai rien vécu. Je suis là, statique, pendant des heures. La ville grouille autour de moi. Un étrange sentiment. La seule échappatoire, c'est les relations humaines. Mais, dans la rue, si moi j'ai le choix, les Parisiens, eux, n'ont pas le temps. Ils ne font que passer.
En réalité, les gens qui nous parlent, on ne les choisit pas. Ce sont ceux qui forcent les plots, qui veulent à tout prix se garer, qui s'énervent à Belleville ou dans le Sentier, et qui nous menacent parfois physiquement. Toujours une bonne raison. La mère qui est malade, les enfants à prendre à l'école. "Juste cinq minutes". Il faut rester zen et pa