Fumel (Lot-et-Garonne) envoyée spéciale
Tous les matins, Jean-Claude, visage buriné, béret, prend son café dans ce bar de l'avenue de l'Usine. Du comptoir, il lui suffit de tourner la tête. La fonderie est là, de l'autre coté du trottoir. Avec son interminable mur d'enceinte, long d'un kilomètre. Ouvrier fraiseur, il y a passé trente-cinq ans avant de partir à la retraite en 1995. Sans vraiment la quitter. C'est que tout Fumel, commune du Lot-et-Garonne de 6 000 habitants vit au rythme de Sadefa, véritable poumon de la région.
Tout connu. Ce matin, dans le café, on a relégué au second plan le rugby et la chasse. Au centre des conversations, le dépôt de bilan de la fonderie le 27 avril. Les heures glorieuses, les plans sociaux, les pertes abyssales, la valse des directeurs... Jean-Claude a tout connu. Dans les années 70, Fumel, accrochée à flanc de colline, est une prospère ville minière ; paradoxe dans ce département agricole. Pendant des décennies, les paysans avaient l'habitude de récolter le minerai à même le sol et de le porter à l'usine. Histoire d'arrondir les fins de mois.
Pont-à-Mousson, qui a acquis la fonderie dans les années 30, est bonne mère pour Fumel. L'usine embauche à tour de bras : 3 000 salariés y travaillent en 70 sans compter les sous-traitants. L'usine, qui construit alors des tuyaux, va peu à peu se recentrer sur la fabrication de pièces pour voitures et poids lourds. Les ouvriers sont bien payés et les immigrés portugais et marocains affluent. Dans les c