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Libération

L'oeil du patron

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Faire suivre un salarié ou vérifier son CV, des entreprises n'hésitent pas à faire appel à des détectives privés.
publié le 24 novembre 2003 à 2h01

Caen envoyée spéciale

L'homme braque ses jumelles sur l'entrée d'un petit pavillon, en bordure de la route départementale. Il les repose, monte le chauffage de sa BMW, pousse un grognement. Deux semaines de planque et «rien. Il reste terré comme un rat». Encore une cigarette. Et un cri. «Il sort !» A 300 mètres, une camionnette a franchi les portes du garage pavillonnaire et remonte maintenant la route, droit sur la BMW. L'homme s'écrase dans son siège. Puis, volant dans une main, dictaphone dans l'autre, il braque, et entame la poursuite. «15 h 25 : le surveillé quitte son domicile à bord de son véhicule.» Eric Tellier est détective privé. Il a été mandaté par le patron du conducteur de la camionnette. «Le client m'a dit : voilà, j'ai un employé qui est en arrêt maladie. Mais il n'est pas malade. Il profite de ce temps libre pour vendre des poulets et organiser des banquets dans la région.» Le client veut des «preuves», qui lui permettront de négocier un licenciement aux torts de son salarié. «L'idéal, ce serait une photo avec un poulet», dit Eric Tellier en accélérant.

La camionnette file vers le centre du village, une petite agglomération de la banlieue de Caen. Puis, brusquement, s'arrête sur le bas-côté. «15 h 28 : le surveillé se gare à l'entrée de la rue X.» Il redémarre. Sur le parking de la mairie, même manège. Arrêt, attente, nouveau départ. Eric Tellier commente. «C'est pas net. Il se sent surveillé.» Une demi-heure et quelques autres arrêts plus tard, la camionnett