Londres de notre correspondant
Un procès fleuve risque de porter atteinte à l'une des institutions les plus respectées du royaume. Pour la première fois en trois cents ans d'histoire, la Banque d'Angleterre comparaît depuis hier devant la Haute Cour de justice de Londres. Elle est accusée d'avoir failli dans le scandale de la BCCI, la Bank of Credit and Commerce International, lorsqu'elle exerçait encore les fonctions de régulateur financier.
Ardoise. En juillet 1991, reconnue coupable de fraudes massives allant du blanchiment d'argent au trafic de drogue, la BCCI, fondée vingt ans plus tôt par de riches Pakistanais, s'est écroulée. Elle a laissé une ardoise de 10 milliards de dollars (7,8 milliards d'euros) et des dizaines de milliers d'épargnants ruinés à travers le monde. Depuis dix ans, le liquidateur de la banque, le cabinet Deloitte & Touche, exige que ses 6 500 déposants britanniques soient indemnisés et réclame 850 millions de livres (1,19 milliard d'euros).
Alors que les preuves de malversation s'accumulaient depuis le milieu des années 80, la banque centrale n'a ordonné une investigation (confiée à Price Waterhouse) qu'en mars 1991, quatre mois avant l'effondrement. Selon la loi anglaise, elle ne peut cependant pas être poursuivie pour négligence ou incompétence. Les avocats de Deloitte & Touche veulent donc prouver qu'elle a commis un délit plus grave, et aussi beaucoup plus rare, de misfeasance, un vieux terme de droit qui signifie qu'elle savait «mal agir».
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