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Libération
Interview

«Si on lâche prise, la société éclatera»

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publié le 5 mars 2004 à 23h36

Pékin, de notre correspondant.

Agé de 37 ans, Han Deqiang est un économiste de la «nouvelle gauche» chinoise, qui met en garde contre les dérives de la mondialisation. Professeur à l'université de l'aéronautique de Pékin, auteur d'un livre anti-OMC, il est l'un des rares intellectuels à s'exprimer publiquement contre la politique économique du Parti communiste chinois (PCC).

Quelle est l'importance de cette réforme constitutionnelle ?

La Chine prônait auparavant la propriété publique totale, donc la question de la propriété privée est sensible. Mais, dans les faits, nous ne sommes plus un pays de propriété collective depuis longtemps. Nous avons un système mixte. Nous avons toujours beaucoup d'entreprises publiques, mais elles sont gérées par des cadres politiques ou des bureaucrates, ce qui n'est finalement pas mieux que le privé. Ils ne servent plus les intérêts du peuple.

La «nouvelle gauche» est bien silencieuse sur ce point...

J'ai reconnu depuis longtemps que la gauche avait échoué en Chine : nous sommes au fond de la vallée... Il y a deux courants : celui de la vieille gauche qui nie les vingt ans de réforme et d'ouverture ; et celui, dont je suis, qui estime qu'on ne peut pas nier le processus de privatisation et se prononce pour un contrôle social de l'économie de marché. Je suis pour la protection des biens privés, mais, si on lâche prise au privé, la société éclatera. On peut appeler cela un programme social-démocrate : si on y arrive, ce sera un grand progrès pour la