Philippe dort bien. Le bureau est un peu dur, mais le sommeil est profond. Entre deux siestes, il décroche le téléphone. Qu'il passe aussitôt à son collègue. Philippe est fonctionnaire, catégorie A. Au ministère des Finances. Il est ponctuel, arrive à l'heure et repart la journée terminée. Il est très bien noté, et sa carrière avance normalement. En face de lui, Laurent fait la grimace. Tout le travail est pour lui, pour un salaire identique. Un peu de mérite dans sa rémunération? «Pourquoi pas», lâche ce cadre pourtant très attaché au principe d'égalité qui caractérise la fonction publique.
Lancée il y a un an par Jacques Chirac, l'idée, depuis, a fait son chemin. Au Président qui se demandait si «chaque service, chaque fonctionnaire se voyait assigner des objectifs clairs», et qui s'inquiétait de savoir «comment sont pris en compte l'engagement, l'efficacité et le mérite», le ministre de la Fonction publique, Jean-Paul Delevoye, a proposé un nouveau régime de rémunération pour un millier de hauts fonctionnaires. Dès cette année, sur la base de contrats d'objectifs, «un certain nombre de cadres supérieurs de l'Etat bénéficieront d'une rémunération globale comportant une part variable de 15 à 20 % du total». Parallèlement, trois ministères Intérieur, Justice, et Finances prévoient d'individualiser une partie des rémunérations en fonction du mérite impliquant donc une notion de rendement et de rentabilité et pas seulement celles des cadres. Mais, en l'absence de critère