Il ne pouvait plus se taire. «Ça faisait vingt-sept ans et demi que mon métier, c'était d'empoisonner les gens. On laissait s'écouler du jus de cadavres d'animaux vicié dans la nature, on laissait les carcasses entassées pourrir sans aucune précaution sanitaire. Quand la crise de la vache folle a éclaté, j'ai craqué : il fallait que je parle.» On est en 2001. Dix ans plus tôt, Francis Doussal, chef de fabrication à la Saria, premier équarrisseur français, avait tenté d'alerter sa hiérarchie sur les agissements illégaux de son entreprise. Résultat : une mutation, à 800 kilomètres de chez lui. Cette fois, il prend les grands moyens : une lettre ouverte, publiée dans la presse régionale. Il est immédiatement licencié. Devant le tribunal correctionnel de Vannes, la réalité des infractions commises par la Saria est pourtant reconnue. Elle est condamnée à de lourdes amendes. Mais les prud'hommes ne veulent rien entendre. Le code du travail ne prévoit pas la protection du salarié qui dénonce une fraude commise par son entreprise. Quel que soit le domaine finances, sécurité publique, santé publique... , quel que soit le danger. Le «devoir de confidentialité», le «lien de subordination» invoqués par l'employeur justifient le licenciement.
La justice a validé celui de Francis Doussal pour «abus de liberté d'expression». «Une aberration», s'emporte l'avocat João Viegas. Spécialiste du droit social, il défend François B., ancien cadre d'EDF mis à la porte pour avoir averti les pouvoir