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Libération

Belle gueule, belle paye.

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Officiellement, ça ne compte pas... mais le physique est aussi un critère d'embauche. A chaque entreprise, son casting.
publié le 4 octobre 2004 à 2h24

Un bar avec vue sur les toits de Paris. Tables en verre, soliflore avec gerbera rouge orangé en ornement délicat. Fauteuils lestés au design inconfortable. Les verres d'eau gazeuse sont à 5 euros mais au moins sont-ils apportés sur un plateau par des gravures de mode. Des serveurs de papier glacé, époustouflants beaux gosses, de ceux qui égaient les Abribus sur les pubs Lancôme ou Azzaro. «Dans ce genre d'endroit, on a plus de chance de rencontrer des mannequins que des employés Cotorep», fait remarquer cette salariée. Faut-il être un modèle de beauté pour servir deux Coca tranche ? «Personne ne l'avouera et ce n'est pas de la médisance de notre part mais il y a un truc, là, comme ailleurs», dit Serge Le Sellier, de la CGT restauration.

Officiellement, le physique ne rentre pas en ligne de compte lors d'un entretien d'embauche. Officieusement, oui. L'agence de travail temporaire Adia a réalisé un testing délit de sale gueule dans le recrutement entre le 13 avril et le 14 mai. Avec le chercheur Jean-François Amadieu, directeur de l'Observatoire des discriminations à la Sorbonne, l'agence d'intérim a répondu à 258 offres d'emploi pour des postes de commerciaux en envoyant à la fois le CV d'un jeune homme de référence, bien sous tous rapports, et celui d'une créature Photoshop. Homme au physique atypique qui se serait pris une porte : nez en trompette, tête écrabouillée, grosses lunettes. «Ce n'était certes pas Hugh Grant, mais ce n'était pas non plus le musée des horreurs», déc