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Libération

«Je ne veux pas voir ça, je perds ma vie, là»

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publié le 10 novembre 2004 à 2h56

Noyelles-Godault, envoyée spéciale.

Elle est tombée lentement, comme un arbre. La cheminée de brique d'évacuation des gaz brûlés du haut-fourneau de zinc de l'usine Metaleurop s'est écroulée, hier, à Noyelles-Godault (Pas-de-Calais). Premier véritable signe que la fonderie centenaire, liquidée le 10 mars 2003, est bien morte.

Sita France, filiale de Suez qui a repris le site il y a un an, se donne dix-huit mois pour le dépolluer, avant d'en faire un site dédié au recyclage industriel et au compostage à grande échelle. Un cocktail d'amiante, de zinc, de plomb, de cadmium, d'arsenic et d'hydrocarbures, entre autres, en fait le site le plus pollué de France.

Prêts à repartir. Des salariés du site ont applaudi quand la cheminée géante est tombée. Mais pas les anciens de l'usine venus assister au spectacle. «Aujourd'hui, tous mes anciens collègues disent : "Si demain on relance la fonderie, on est prêts à repartir", soupire Jean-Claude Lemaire, le regard perdu. Il n'y en a pas un qui est heureux.» Cet ancien comptable de Metaleurop a trouvé du travail à Activ-Coeur Environnement, un cabinet-conseil en dépollution fondé par des anciens de l'usine. Mais n'a toujours pas fait son deuil. Et, surtout, n'accepte pas que sur les 677 encore en âge de travailler seuls 287 aient trouvé un emploi. «Les collègues, ils ont une pudeur. Ils le diront pas qu'ils sont dans la merde.» Sur les 100 employés actuels, à Sita France ou chez des sous-traitants ­ 100 embauches de plus prévues à l'horizon 20