Noyelles-Godault envoyée spéciale
«On était en froid avec l'entreprise classique. Pour nous, les patrons, c'étaient tous des crapules.» Jean-Pierre Bertrand, ancien de Metaleurop, fils, petit-fils et père de métallo, est ancien délégué CGT à la fonderie de Noyelles-Godault (Pas-de-Calais). Il a commencé sa carrière de patron derrière une banderole. En colère à l'annonce de la fermeture de Metaleurop, en janvier 2003, il était de toutes les manifs, comme Jean-Claude, Daniel, Eric, Jacques et Jacky. Ces quatre derniers sont devenus associés de Jean-Pierre Bertrand. Quand ils ont créé Activ-Coeur Environnement, cabinet-conseil en dépollution, sur le site de leur ancienne entreprise, les ex-fondeurs n'avaient pas envie de ressembler à ceux qu'ils avaient «combattus pendant trois mois» : les «patrons voyous» et un actionnaire richissime avaient laissé tomber leur filiale, laissant orphelines plus de 800 personnes sur un des sites les plus pollués de France.
Alors, après trente ans, dans une boîte où «le patron était Dieu le Père», ils ont créé une Scop. «Une entreprise où les salariés ont leur mot à dire, ça nous plaisait bien.» L'idée est née sur le pavé, et à la cantine, lieu de la lutte, pendant la bagarre des métallos. «On ne pouvait pas laisser le site dans cet état-là», reconnaît Eric Dennetière, responsable du traitement des boues. Au début, ils s'imaginent embaucher trente personnes et sécuriser tout le site, où cohabitent acides, plomb figé, cuves de zinc qui dégagent un g