«Quand j'ai postulé pour devenir receveuse de péage, mes futurs employeurs m'ont demandé si j'étais consciente que pour ce boulot j'allais être enfermée dans une cabine de 1,50 m sur 1,50 m. J'étais caissière dans un hypermarché avant, alors l'exiguïté et l'enfermement, je connaissais.
Le matin, dès 5 heures, je rentre dans mon petit aquarium. Il existe des maxicabines, bien aménagées, avec des toilettes et même des plaques électriques. C'est un grand luxe... auquel je n'ai pas droit. Dans ma guitoune, on peut tenir à deux, mais on ne peut pas bouger beaucoup. Pour la pause toilettes, je dois me faire remplacer par un agent sur les voies. Et quand ça roule trop... j'attends un moment plus calme pour fermer mon guichet.
Les routiers sont les clients qui me causent le plus de gêne, rapport à la cabine. Comme ils sont plus élevés que les voitures, je dois tendre davantage le bras en l'air, et je me tords le corps pour leur prendre le carton. Mes cervicales et mon dos en prennent un coup à chaque passage. Mes oreilles souffrent aussi quand ils freinent en arrivant au péage. Mais, en plus de vider leurs bouteilles d'air pour ralentir, ils perdent aussi du carburant. Les premiers temps, les vapeurs d'essence juste après le croissant et le café du matin me retournaient l'estomac. Après treize ans de service, je me suis habituée à cette odeur de gasoil, dans ma cabine et sur les vêtements. Je regarde la noirceur des murets et j'imagine ce qu'on respire. La ventilation n'est pas assez