«Ma journée de travail commence par une petite séance de gymnastique. Pour rentrer dans ma cabane de démonstrateur-vendeur de cravates devant les grands magasins à Paris, je dois enjamber la barrière de mon stand. Au début, je me cognais partout. J'en ai troué des jeans, et je m'en suis fait des bleus aux jambes. La visite de ma guérite est plutôt rapide, on en a vite fait le tour, surtout quand on y passe plus de neuf heures par jour. Je me suis amusé à mesurer les dimensions de mon espace de travail : 40 cm sur 40 cm. Je tiens juste debout et encore. Heureusement, je ne suis pas très grand. Les jours où je me coiffe les cheveux en brosse, même avec du gel extrafort, ils sont raplatis illico. Le vendeur qui mesure plus d'1, 75 m touche direct le plafond. L'été dernier, un collègue faisait 1,85 m et il travaillait courbé. Comme nous n'avons pas le droit de nous asseoir, son mal de cou et de dos l'ont poussé à partir.
Bizarrement, le manque de place ne se fait vraiment sentir que les jours de livraisons. Je suis vite noyé et étouffé sous mes cravates. Quatre cartons de 24 boîtes et j'affiche complet ! Je stocke même des boîtes à l'extérieur devant mon stand quand je ne peux plus rien rentrer. Pour autant, je ne me sens pas oppressé, vu que je bosse dehors. C'est justement ça qui est le plus difficile. Le bruit du boulevard, sa pollution automobile, le va-et-vient des gens. Les passants ne sont pas toujours aimables, ils nous prennent plus pour des attractions de fête foraine q