Washington de notre correspondant
Les Californiens le savent bien : le «Big One» le plus affreux des tremblements de terre surviendra un beau jour sans trop prévenir. En attendant, ils jouissent du soleil et des palmiers. Avec le dollar, c'est un peu pareil. Depuis une dizaine d'années, les sismologues de la finance internationale prédisent une grave crise de confiance : une fuite massive des capitaux, suivie d'ajustement douloureux. On ne peut pas, répètent-ils, vivre indéfiniment au-dessus de ses moyens.
Or c'est ce que font les Américains, empruntant quelque 50 milliards de dollars par mois (soit 5 % du PIB) pour couvrir leur déficit courant. Le dollar s'affaiblit, et les marchés testent sans cesse de nouveaux planchers, à la recherche de celui qui craquera une bonne fois pour toutes. Le gouvernement américain fait mine de se désintéresser du problème, car la baisse du dollar, jusque-là, aide grandement les exportateurs. Elle joue, pour l'économie américaine, le rôle du soleil et des palmiers californiens. Depuis la réélection de George Bush, le 2 novembre, les alertes au «big one» s'accélèrent.
Les investisseurs institutionnels, ou «zinzins», (compagnie d'assurances, fonds de pensions...) ont réduit, dans leur portefeuille, la part des emprunts d'Etat américains, préférant faire une place plus grande aux obligations européennes (quelques banques centrales, comme la Banque de Chine, ont fait de même). Selon un pointage réalisé par Merrill Lynch auprès de 89 grands zinzin