Ça ressemble à quoi, un économiste libéral, un vrai de vrai? A un bonhomme alerte et dégarni de 74 ans, Gary Becker, qui, d'une voix posée, affirme à la fois sa «sympathie pour les pauvres» et plaide pour un «marché du travail flexible». En visite pour une série de conférences à l'American University of Paris, Becker a répété les canons libéraux classiques : un Etat minimal et le plus de concurrence possible. Mais il a ajouté sa quasi marque de fabrique, l'extension des calculs économiques à la criminalité, au mariage, au choix de faire des enfants. L'auteur de l'Economie de la vie n'a cessé, durant sa carrière, d'appliquer l'analyse microéconomique à tous les comportements humains, même non-marchands, ce qui lui a valu le prix Nobel en 1992.
«C'est une caricature de libéral», estime Bernard Maris, chroniqueur à Charlie Hebdo et enseignant à Paris-VIII. «Un marxiste peut expliquer n'importe quel choix politique, social ou personnel en terme de lutte de classe, lui peut tout expliquer en terme de choix rationnels. Cela dénie l'existence du collectif, de choix irrationnels, du poids de l'histoire.» A cette aune, l'augmentation des divorces s'explique par une modification de la «division du travail» dans les couples. Et mieux vaut libéraliser la drogue, à partir du moment où les individus sont informés de ses dangers, car lutter contre le trafic coûte plus cher que cela ne rapporte.
Becker est un représentant de l'Ecole de Chicago, du nom de l'université où enseigna notamment Mil