Pourquoi s'attacher à son lieu de travail ?
Parce qu'on y passe un tiers de sa vie ! Au travail, comme dans le privé, on a besoin de répéter les choses pour avancer. Alors, nous exigeons des repères visuels ou corporels : les objets ou les sons qui nous entourent. Les salariés investissent les murs. Que ce soient en y accrochant des photos ou leurs représentations mentales. Nous suivons des rituels, prenons toujours le même itinéraire pour gagner notre bureau. Les lieux sont porteurs de mémoire. Et sans mémoire pas d'avenir.
Que provoque alors le déménagement ?
Les entreprises ont un dogme : le changement est porteur. Mais, d'un point de vue psy, le changement n'est pas dans la nature de l'homme ! Brutal, il peut augmenter les troubles anxieux, les risques alcooliques. Alors que le surmoi, le moi social, nous pousse à évoluer, l'inconscient résiste au changement, car il fonctionne à l'économie. On fait donc des compromis. En 1998 à Dreux, j'ai participé à la création d'un bâtiment pilote étudié pour accueillir un nouveau service psychiatrique. Pourtant, après le déménagement, plus rien ne marchait : les protocoles médicaux les plus évidents n'étaient même plus suivis par les équipes qui perdaient leurs repères. Car les gestes professionnels sont inséparables de leur inscription spatiale. Alors que le déménagement imposé entraîne un mouvement paranoïaque des salariés «c'est la faute au patron» , le changement «offert», un peu paternaliste, c