L'avocate de la RATP débarque à l'audience avec une valise à roulettes. Elle l'ouvre et balaie de la main des paquets de plusieurs centaines de pages : «Regardez ça !, lance-t-elle à la présidente des prud'hommes de Paris. Et ce ne sont que les conclusions de la partie adverse !» Hier, neuf agents de sécurité de la RATP, anciens sportifs de haut niveau, portaient plainte pour harcèlement moral devant les prud'hommes de Paris (Libération du 31 mai). Les pièces ont eu le temps de s'accumuler : sur demande de la RATP, les audiences ont déjà été reportées deux fois. Selon l'avocat des plaignants : «C'est aussi ça, le harcèlement qu'on inflige à ces hommes...»
D'un banc à l'autre, on s'intimide du regard, on se provoque. L'avocat des «gros bras» parle d'hommes «en état de délabrement physique, cassés, brisés». Il énumère les «atteintes à la santé», les «brimades» mentionnées dans une expertise du cabinet Emergences, à la demande du CHSCT (comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail) du département sécurité de la RATP. L'entreprise conteste les témoignages de collègues rapportant les humiliations. «Ils se sont fourni des attestations les uns aux autres.» Même défense à la lecture de témoignages d'agents de maîtrise avouant que leur hiérarchie leur demandait de cibler telle ou telle forte tête.
Pour la RATP, les agents de sécurité détournent la procédure de harcèlement moral pour s'opposer à sa nouvelle politique, «qui veut les faire passer de l'action à la prévention»