Bourg-de-Péage (Drôme), envoyée spéciale.
La pelouse n'est pas tondue depuis longtemps. Le parking est vide. L'usine Stéphane Kélian, à Bourg-de-Péage, est en sommeil. Les 146 ouvriers qui avaient prévu de reprendre le travail aujourd'hui pourraient n'avoir jamais à y remettre les pieds. Ce matin, le tribunal de commerce de Romans-sur-Isère doit décider du sort d'un des trois derniers fabricants français de chaussures de luxe. Le 29 juillet, la direction annonçait aux syndicats que l'entreprise était sur le point de déposer le bilan, en raison d'un passif trop lourd. La nouvelle leur a été officiellement confirmée en comité central d'entreprise, le 12 août. Depuis, seul signe tangible de l'avenir sombre qui attend les salariés : une lettre scotchée sur la porte de l'usine qui explique qu'ils n'auront pas besoin de se présenter à la reprise du travail.
Cyniquement. Chronique banale d'une entreprise en difficulté, dans une conjoncture de plus en plus dure ? «Quand on vend des pompes à 1 000 euros la paire, il ne faut pas me faire croire qu'on a des problèmes avec le coût de la main-d'oeuvre», tonne Didier Guillaume, le président (PS) du conseil général de la Drôme. Le délégué syndical Force ouvrière (FO), Eric Patel, employé chez Kélian depuis huit ans, doute aussi de l'enchaînement des événements. Depuis début août, il alerte les collectivités locales, les salariés et l'inspection du travail sur la situation de l'entreprise. Et met au jour certaines bizarreries dans la mort pro