«Tout se coupe d'un seul coup à partir du moment où le mot sida est lâché.» Jean (1), 43 ans, est «malade du sida» depuis seize ans. Et il n'a pas peur de le dire. Il y a six ans, avec un taux nul de lymphocytes T4, il a développé des maladies opportunistes. En plus de sa trithérapie, son médecin l'a placé sous Interféron, pour combattre l'hépatite C. Aujourd'hui, son taux a un peu remonté.
Avant l'été, Jean a postulé pour un job de serveur dans un pub du sud de la France. Sur les mains, il a quelques petites verrues plates et quelques plaques. Rien qui aurait pu trahir son état de santé. «J'ai quand même joué la carte de la vérité.» Mal lui en a pris. L'un des deux gérants du bar a fait blocus. «Le patron conciliant en a discuté avec les huit employés du bar qui ont pris peur. Il m'a expliqué qu'il aurait bien accepté de me prendre, mais comme certains de ses employés se sentaient mal à l'aise, ou que ça en dérangeait d'autres, le refus a été catégorique.»
Quelques mois auparavant, il avait proposé au maire de sa ville un projet culturel en partenariat avec le syndicat d'initiative. «A l'époque, je boitais pas mal. Ce ne sont pas des paralysies mais des fortes douleurs. Mon traitement était comparable à celui d'une chimio, il ne s'est pas posé de questions, il pensait que j'avais un cancer.» Les discussions s'enchaînent, le maire accroche, et propose à Jean un poste à mi-temps à l'office de tourisme. Jean passe alors à la télé locale pour témoigner en tant que malade. «Alors