«Le débat sur la libéralisation de l'agriculture est indigne. Comment peut-on penser mettre en compétition des univers aussi inégaux qu'un petit exploitant africain qui récolte 10 quintaux de mil et un fermier américain qui récolte 20000 quintaux de blé ? Ne pas prendre en compte cela, c'est manquer de bon sens. Comme penser qu'on peut tout soumettre au libre-échange, sans contrainte, les ressources naturelles comme les forces de travail. Comment oser dire que tout le monde va être le gagnant de la dérégulation des barrières tarifaires et non tarifaires, des subventions aux exportations et des aides internes ? C'est oublier la réalité : les problèmes climatiques, le déficit d'infrastructures, le non-accès au crédit... En vingt ans, l'Afrique a perdu les deux tiers de sa part dans le commerce mondial, de 6 à 2 %. Et encore, dans ces 2 % on inclut les industries extractives tenues par les multinationales. Sous la pression de la Banque mondiale et du FMI, les tarifs douaniers ont plongé, jusqu'à 5 % maximum. Et les produits de bases ont chuté de 70 %. Qui va gagner à ce jeu-là ? Les grands latifundiaires de Nouvelle-Zélande ou du Brésil, pays le plus inégalitaire du monde ? Pourquoi imposer à trois milliards de personnes, 50 % de la planète, cette concurrence Sud-Sud frontale? A ce rythme-là, ce sont des centaines de millions de personnes qui sont menacées par la pauvreté. Ce qu'il a fallu faire en un siècle en Europe, on demande au reste du monde de s'y plier en un temps recor
Interview
Pourquoi faut-il protéger l'agriculture ?
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par Christian Losson
publié le 9 décembre 2005 à 4h53
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