A Londres
Face à un pays qui se rassure sous l'auvent de l'égalité républicaine, certains des diplômés français issus de minorités ethniques, comme on dit en Grande-Bretagne, sont devenus allergiques à la France. Ils ne veulent surtout pas être identifiables (1). A Londres ou à Birmingham, ils ont trouvé un emploi parfois très qualifié.
Yasmina a 29 ans. S'est spécialisée sur un créneau, le droit public, a passé en France un DESS en droit de l'urbanisme. Diplômée, elle a cherché durant neuf mois. Alors qu'elle était finaliste pour devenir directrice de communauté de communes dans une zone rurale, un membre du jury lui a expliqué pourquoi elle avait été écartée : «Vous savez, les gens ici sont âgés et paysans...» Ce fut sa dernière quête d'emploi en France. A Londres, elle enseigne le français et songe à reprendre un cursus anglais sur l'urbanisme.
Hacène a arpenté l'Europe pendant six ans : la Suisse, la Belgique, l'Italie, l'Espagne, comme serveur ou dans des petits boulots. Puis il prépare le bac par correspondance, un Deug de littérature anglaise, avec une «mineure» en japonais. En licence, il part en Europe du Nord dans le cadre d'un programme Erasmus. Sa maîtrise terminée, il sera administrateur des examens d'anglais (langue étrangère) à l'université de Cambridge. Tente un retour en France, en vain. Il vit aujourd'hui à Birmingham, maîtrise huit langues, est directeur de projet dans une entreprise de traduction qui effectue la rédaction de manuels techniques en 23 langues.