Londres de notre correspondante
Soudain, Hamid, aîné d'une famille de huit enfants père ouvrier marocain, trente ans de chaîne à coller des revêtements de caravane, mère au foyer qui n'est allée qu'un an et demi à l'école , en a eu marre d'être toujours puni plus durement que ses frères et soeurs. Il avait 10 ans. Son père, arrivé en France au début des années 1970, l'a pris à part et lui a expliqué qu'il serait toujours le plus sévèrement traité : «Il m'a expliqué que j'étais l'aiguille, et mes frères et soeurs la ficelle. Si l'aiguille marchait bien à l'école, les autres passeraient par le chas de l'aiguille et suivraient l'exemple.» Hamid S. a écouté. Et obéi. Et cru à l'ascenseur social, lui qui se pensait français. Près de vingt ans plus tard, il n'y croit plus.
«Pénitencier». Il vit à Londres, vient de monter une société de consulting en management, Vision Enabler. L'idée de revenir en France pour y travailler, «c'est comme si on me promettait le pénitencier». Quand les violences ont éclaté dans les cités de banlieue française, il a été interviewé par des journalistes médusés de la BBC Worldwide. Il leur a parlé racisme à l'école, humiliation et, même pour les fils d'immigrés de deuxième génération, discrimination à l'emploi. Il n'est pas un cas isolé. Comme lui, Aziz, Yasmina, Ayo et d'autres Français d'origine maghrébine ou africaine dotés de solides qualifications professionnelles ont décidé de prendre la fuite (lire ci-dessous). En Grande-Bretagne, ils ont eu sans