Sandouville (Seine-Maritime) envoyé spécial
Un vent glacé amasse des petits paquets de tracts au pied des grilles. Il est 13 heures. Equipes du matin et de l'après-midi se croisent sur le parking du personnel de l'usine Renault de Sandouville. Les élections professionnelles approchent et tous les syndicats, postés à la sortie, distribuent généreusement leur prose. Mais c'est une autre échéance qui tracasse les salariés : l'annonce officielle, le 9 février, par le président Carlos Ghosn, du plan stratégique triennal de Renault, préparé dans le plus grand secret. Dans l'attente du plan de bataille du constructeur, censé relancer la gamme et les ventes après une année 2005 pas flamboyante en Europe occidentale ( 4,6 %), les fantasmes vont bon train. Les plus jeunes envisagent le pire, comme Françoise (1), 23 ans dont quatre à l'usine : «Ça craint. Je crois qu'on nous cache la vérité et que ça va fermer.» René, 54 ans, n'a jamais connu telle anxiété : «Avant, les gens étaient d'attaque. Ils faisaient grève pour une tache d'huile, une pendule pas à l'heure ou pour partir plus tôt avant un match de foot. Aujourd'hui, ils ont peur.»
«A l'abri de rien». Pour les salariés de Sandouville, 2006 a mal commencé : avec huit jours de chômage technique sur le seul mois de janvier. Soit, pour un opérateur à la chaîne, environ 200 euros de moins sur la fiche de paie. «On a des gens qui travaillent chez Renault, en CDI, et qui ont du mal à payer leurs factures en fin de mois», déplore Alain Ric