«Aujourd'hui, il faut que je monte ma propre boîte, je n'ai plus le choix.» A 30 ans, Sonia Alegre a tout essayé, frappé à mille portes, accumulé diplômes et expérience, supporté les situations professionnelles les plus incommodes. «J'ai fait le tour de la question. Je sais que, sans piston, le système ne peut m'offrir davantage.» Elle travaille à Intereconomia, une télévision basée à Madrid, où elle est chargée d'obtenir des encarts publicitaires auprès des institutions. Au moment de son embauche, l'an dernier, l'employeur lui avait promis un salaire décent, une voiture à disposition et un cameraman. A l'arrivée, il lui faut tout prendre en charge seule, utiliser sa propre voiture et se contenter de 1 044 euros par mois. Sonia refuse de vivre comme une «misérable», aux crochets de ses parents qui vivent en Aragon ; entre son loyer (660 euros), la nourriture et les sorties, elle dépense 2 000 euros par mois. «Je suis en train de dilapider mes économies, mais tant pis.»
«Lamentables». Cette épargne, elle la doit à ses émoluments passés 3 000 euros mensuels dans une agence de communication argentine qui, tout en la défrayant avec largesse, la faisait voyager au Soudan, au Mexique ou au Venezuela. Après trois années «riches en expériences», elle débarque à Madrid, en 2003, persuadée qu'avec sa licence en administration d'entreprises, son BBS (bachelor of business studies, l'équivalent d'une maîtrise de commerce) à l'université Schiller de Heidelberg et un MB