Bamako envoyé spécial
C'est un déluge de mots, de témoignages, de colères qui irrigue le Forum social mondial. Les migrations, les émigrations, les répressions, les expulsions. Des Ceuta et des Melilla. Des destins. Des murs. Des morts. «Deux fois plus en dix ans que dans toute l'histoire du mur de Berlin», résume Marine, du réseau Migreurop, qui a dressé une carte des 650 camps d'étrangers en Europe : 25 000 migrants victimes de «machines à expulser» (1). Jusqu'à présent, rappelle un avocat nigérien, «les Forums sociaux mondiaux évoquaient le sujet sous l'angle du racisme ou de la discrimination». Occultant les enjeux économiques. «Or les plans d'ajustements structurels ont aggravé la misère», rappelle le Sénégalais Boubacar Diop.
«J'étouffe.» Le Mali fait partie de cette trentaine de pays qui voient leur richesse par habitant baisser depuis vingt ans. La privatisation du rail supprime des postes dans les régions ; les subventions américaines au coton favorisent l'exode rural ; le chômage massif obère l'espoir des plus jeunes, même diplômés. «J'ai 27 ans, je parle quatre langues, j'étouffe», résume Alassane Coulibaly lors d'un séminaire «Migrations et néolibéralisme». «Quand la France parle d'immigration ciblée, j'ai mal, s'indigne Dabo Ibrahim, lycéen. Hier, la colonisation, dont on ose dire qu'elle a eu des effets positifs, a pris nos grands-parents. Et là, on parle de faire le tri sur nos cerveaux ? Pur néocolonialisme.»
Même formés sur le continent africain, beaucoup s'exi