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Libération
Critique

Cadres familiers

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La caméra de Fabienne Godet capte l'ambiguïté de ces salariés à responsabilités, à la fois humiliants et humiliés.
publié le 13 février 2006 à 20h20

Avec en poche un moyen métrage remarqué, la Tentation de l'innocence, Fabienne Godet, cinéaste trentenaire qui n'a pas froid aux yeux, s'est lancée dans un genre casse-gueule par excellence : le film d'entreprise. Pas la promotion de la façon dont monsieur Moulinex applique les 35 heures ; pas d'avantage la chronique compassée et lyrique du dernier conflit chez Michelin. Mais en campant une fiction, avec de bons comédiens ­ et pas des moindres, d'Olivier Gourmet à Dominique Blanc pour les meilleurs, de Julie Depardieu à Marion Cotillard pour les vedettes ­, dans une boîte de province aux tensions sociales à vif. Soit, selon la veine récente du film avec des morceaux de vrais gens dedans, ce qui se fait de mieux, entre Ressources humaines de Laurent Cantet et Violences des échanges en milieu tempéré de Jean-Marc Moutout.

Martyrs de quotidien. Fabienne Godet pratique un cinéma rentre-dedans, semblable à sa manière de filmer les voitures qui roulent dans la nuit, conduisant l'errance des hommes jusqu'à l'aube blême d'un hôtel meublé miteux. Chez elle, les hommes s'affrontent, porteurs des germes de tous les conflits (sociaux, politiques, culturels), avant de rester sur le carreau pour la plupart, suicidés, abattus, aliénés, effondrés, emprisonnés. Les femmes prennent alors le relais, avec leur énergie : ce sont elles qui se relèvent, mènent l'enquête, appuient où ça fait mal, traversant les jours de galère et les nuits sans sommeil.

Mais Fabienne Godet n'est pas seulement une mèr