Lors de leur enquête publiée en 2001 sur les Intellos précaires, Anne et Marine Rambach ont demandé aux chercheurs, enseignants, vacataires, écrivains et journalistes, tous largement surdiplômés et «bosseurs», de calculer le taux horaire de leur travail : «Parce qu'on parle toujours en volume de travail, mais que le temps passé n'est jamais estimé», explique aujourd'hui Anne Rambach. Le calcul se révéla accablant. Il l'est toujours. Exemple, l'auteur d'une enquête, d'un essai est en général payé 1 500 euros d'avance sur droits, payable en trois fois (à signature du contrat, à livraison du manuscrit puis à parution d'un livre sur lequel il aura travaillé plus de trois mois). Rapporté aux 35 heures hebdomadaires, cela donne une rémunération horaire de 3,57 euros (le taux horaire actuel du Smic est de 8,03 euros). Si l'on prend le cas des romanciers, qui passent un an sur leur manuscrit, le calcul confine à l'absurde. Question : les éditeurs, producteurs de télévision, de sites Internet, sont-ils des requins qui ne songent qu'à profiter du travail de leurs auteurs, à moindre frais ? La réponse est plus complexe qu'il n'y paraît.
D'un côté, la critique de Marine Rambach : pour elle, les éditeurs «sont dans une logique de savoir quelle somme ils doivent débourser, mais bien peu raisonnent en termes de longévité. Rares sont ceux qui ont une politique d'auteur volontariste. La question du temps passé par l'auteur ne les intéresse donc pas. Or, elle est vitale. On peut, oui, quand on