Le capitalisme adore les happy ends. Entre grands fauves de la finance mondiale, on peut se balancer des noms d'oiseau pendant plusieurs mois et s'embrasser sur la bouche sous le nez des photographes. Ça ne choque personne. C'est juste la vie des OPA hostiles : quand la bataille est terminée, quand l'assaillant (Mittal, en l'occurrence) a fini par bouffer sa proie (Arcelor), tout le monde rentre dans le rang et retrouve la bonne vieille langue de bois d'avant. C'est barbant.
Vendredi, dans un grand hôtel londonien, Lakshmi Mittal a révélé le nom, jusqu'ici bien gardé, du patron du nouveau groupe. Puisqu'il avait affirmé que ce serait un Arcelor boy et que Guy Dollé avait déclaré forfait, Mittal avait le choix entre les trois autres membres de la direction générale : les Luxembourgeois Michel Wurth et Roland Junck, et l'Espagnol Gonzalo Urquijo. Ce sera Junck. Et, vendredi après midi, tous les deux à la tribune, Junck et Mittal ont donc dansé leur premier boléro. Un poil convenu. «On a la meilleure direction du monde» (Mittal) ; «Nous avons le plus excitant projet de l'industrie sidérurgique mondiale» (Junck) ; «Nous partageons la même vision de l'avenir de notre métier» (Junck). A ce moment-là de la cérémonie, il n'est pas interdit de pouffer un bon coup, quand on se rappelle qu'il y a quelques mois Arcelor passait son temps à déclarer partout que Mittal Steel était le Leader Price de la sidérurgie mondiale, alors que l'avenir n'appartenait