Caen envoyée spéciale
Toute menue, Yolande. Et intimidée. A la main, le petit carton jaune «Procès Moulinex», à présenter à l'entrée. Elle, c'est à 16 ans qu'elle a commencé, sur les convoyeurs. Trente-trois ans sur les chaînes. Licenciée en 2001, comme quelque 5 000 salariés du groupe Moulinex, elle a connu le congé de conversion, cinq mois sans rien, puis les Assedic, enfin, à 55 ans, l'allocation travail amiante : 970 euros par mois. Elle murmure : «J'espère qu'on va savoir la vérité : pourquoi on a été licenciés alors qu'il y avait plein d'argent dans les caisses ?»
C'est Yolande, mais aussi Martine, 51 ans, vingt-huit ans d'usine à 6 400 francs par mois, «avec les primes»... Ainsi, près de 600 ex-Moulinex contestaient hier, à Caen, les conditions de leur licenciement après la fermeture des cinq usines que comptait, en Basse-Normandie, le roi de l'électroménager. Vu le nombre, le tribunal des prud'hommes s'est délocalisé au Centre des congrès de la ville. Une salle comble, quatre avocats de chaque côté, une flopée de journalistes, près de six heures d'audience. Les plaignants réclament environ trois ans de salaires, soit en moyenne 50 000 euros par salarié.
Griefs. Septembre 2001. Moulinex, inventeur du presse-purée dans les années 30, dépose le bilan après une succession de restructurations et une fusion avec les machines à laver Brandt. En Basse-Normandie, 2 880 salariés se retrouvent sur le carreau et quittent les usines de Bayeux, Falaise, Cormelles-le-Roy