Doris, 39 ans, sert dans un bar d'Alcorcon, une ville-dortoir du sud-ouest de Madrid. En comptant les pourboires et les heures supplémentaires, elle émarge à 1 350 euros mensuels. Une fortune, si elle les compare à ce qu'elle gagnait il y a encore quatre ans comme vendeuse ambulante à Quito (Equateur). Mais sa plus grande fierté, c'est d'envoyer environ 180 euros par mois à son père et ses frères au pays d'origine. Doris accomplit là un devoir que s'imposent l'immense majorité des immigrés latinos, Equatoriens et Boliviens en tête. En moyenne, les Equatoriens envoient 200 à 300 euros mensuels à leurs familles, assure-t-on à l'association Rumiñahui.
Dans ce pays andin, las remesas (les envois d'argent de la diaspora) ont atteint l'an dernier 2,8 milliards de dollars. Soit la deuxième source de revenus du pays, derrière le pétrole, et 1,4 % du PIB. Les taxes sur les remesas alimentent en Equateur un fonds spécial. Celui-ci est supposé financer des programmes de développement, mais, accuse Raul Gimenez, de Rumiñahui, il serait détourné par les autorités du pays, notamment pour couvrir des «dépenses diplomatiques et consulaires».
Dans la majorité des cas, les immigrants réalisent ces transactions à travers des locutorios (boutiques d'appels téléphoniques). Et fuient les banques, même si celles-ci multiplient les opérations de séduction pour canaliser les juteuses remesas. Ainsi, le Banco Santander a lancé le programme Comisiones cero (pas