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Libération

La fièvre de l'éthanol fait des victimes au Brésil

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publié le 2 juin 2007 à 8h06

Capivari, Piracicaba (province de l'Etat de São Paulo) envoyée spéciale

«On risque notre vie pour gagner un peu d'argent.» Entassés à huit dans une pièce, Edinaldo et ses camarades ont «peur». Originaires du Nord-Est déshérité du Brésil, ils sont venus ici, à Capivari, dans l'arrière-pays de São Paulo, pour couper la canne à sucre. Encore largement manuelle, cette tâche est «très dure», soupire le jeune homme. Depuis avril 2004, elle a fauché dix-huit coupeurs dans le seul Etat de São Paulo, qui fournit plus de la moitié de la production. Trois d'entre eux travaillaient pour le groupe Cosan, leader brésilien de l'éthanol et du sucre, dans lequel les sociétés françaises Tereos et Sucden ont une participation. Un autre, âgé de 20 ans, a péri fin avril sur les champs d'une usine contrôlée par Tereos.

Epuisement. Fierté du Brésil, qui l'a introduit à grande échelle il y a trente ans, l'éthanol tiré de la canne à sucre n'est donc pas aussi «propre» que le prétendent ses producteurs, les usineiros. La litanie des morts a mis à nu les conditions de semi-esclavage auxquelles sont réduits deux cent soixante mille coupeurs de canne, en particulier les 45 % de migrants. Les circonstances de ces décès ne sont pas encore élucidées mais l'enquête privilégie la thèse de l'épuisement.

Les coupeurs, payés au rendement, touchent 0,93 centime d'euro pour abattre une tonne de canne. La moyenne est de 8 tonnes par jour ; certains coupent jusqu'à 15, 20, voire 25 t