Pour l'économiste Jean Pisani-Ferry, qui dirige le «think tank» Bruegel, dont le siège est à Bruxelles, la BCE veut surtout envoyer un «signal politique».
La décision de la BCE vous paraît-elle justifiée ?
Elle était inévitable : l'inflation atteint 4 %, le double de l'objectif fixé par la Banque centrale, et des signes font craindre une remontée des anticipations d'inflation. Exemple, les salaires négociés ont augmenté, surtout en Allemagne. Mais ce n'est pas avec 25 points de base en plus qu'elle va vaincre l'inflation : la décision d'hier est avant tout un signal. La BCE gère les anticipations en montrant qu'elle est prête à augmenter plus ses taux pour casser une spirale inflationniste. Elle espère ne pas avoir à le faire.
Pourquoi la BCE a-t-elle peur d'une augmentation générale des salaires ?
Un choc pétrolier, c'est un prélèvement extérieur sur le revenu national. Ainsi, en 2007-2008, la totalité des augmentations de revenus générées par la croissance dans la zone euro sera absorbée par l'alourdissement de la facture pétrolière. Si on répercute la hausse du pétrole dans les salaires, cela veut dire qu'on refuse de payer ce prélèvement. On entre dans une spirale inflationniste et on ne gagne rien en termes de revenu car l'inflation est un jeu de mistigri qui ne change rien au fait que le prix d'une ressource venue de l'extérieur a augmenté.
L'inflation hors prix des matières premières reste proche de 2 %. Or, un relèvement des taux d'intérêt ne peut agir que sur cett