Sur les quais, au milieu des grues et des cohortes de coolies du XXIe siècle, des dizaines de milliers de troncs d'arbres de toutes les tailles et de toutes les teintes, fraîchement débarqués par bateau, sont empilés en rangées formant des allées, comme une ville dont les immeubles seraient du bois mort. Sinistre image d'immenses forêts couchées à perte de vue, en amas de dix à vingt mètres de haut, coupés à la taille des conteneurs.
Le port fluvial et humide de Zhangjiagang, à moins d'une heure et demie de route de Shanghai, près de l'embouchure du fleuve Yangzi, à l'est du pays, est le centre névralgique du trafic de bois en Chine. Un trafic croissant, souvent illégal, et dont le pays est devenu en quelques années la plaque tournante mondiale. Il s'agit de satisfaire la demande perpétuelle des millions de consommateurs de parquets, meubles ou papier.
Pins sibériens. Aux alentours, des milliers d'ateliers et de petites usines débitent sept jours sur sept, vingt-quatre heures par jour, les arrivages permanents de ces gros troncs d'arbres venant du monde tropical et boréal. Sibérie, Indonésie, Brésil, Chili, Gabon, Cameroun, Congo, Mozambique, Birmanie, Cambodge, chaque nouvelle cargaison est empilée selon sa valeur et son origine. Selon l'association Global Timber, plus de la moitié des importations chinoises de bois brut seraient illégales ou intraçables, provenant de forêts officiellement protégées.
On se soucie peu ici des conséquences écologiques de l'abattage de tous ces a