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Krach-bulle-hue

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Marc Fiorentino. Patron d’une société de Bourse, cet ex-trader décrypte avec franchise l’addiction au jeu de ses successeurs qui ont fait exploser la planète finance.
publié le 6 janvier 2009 à 6h52
(mis à jour le 6 janvier 2009 à 6h52)

Mis au ban d'un monde développé qu'ils ont allègrement envoyé verser dans le fossé, les traders jouent désormais les timides, les effarouchés. Ces pauvres chéris cousus d'or se comportent comme une espèce menacée à l'ego abîmé par l'opprobre général, et qui devrait se méfier de la lumière du jour. Pas fous, ils s'abritent de l'orage, n'abjurant rien, prêts à en recroquer dès que la météo de la finance-casino se fera plus clémente. Pour exhumer un des spécimens de cette corporation rencognée dans son corridor, il faut donc se tourner vers un repenti qui l'est moins qu'il ne le dit. Car, un ex-trader jamais n'obtiendra l'extradition définitive du paradis qui l'a perdu, qu'il a perdu.

Pour ces Adam et Eve d'aujourd'hui, boulotteurs de pommes pourries après avoir tété le veau d'or, Marc Fiorentino a la compréhension ironique d'un grand frère averti. Il dit : «La honte, ils ne connaissent pas. Ils sont fiers de ce qu'ils ont fait. Le problème, c'est que beaucoup ne savent pas s'ils auront encore le même job demain et que les autres se taisent de peur qu'on leur fasse payer leur liberté de parole.» Et il ajoute, certain que la leçon des subprimes ne sera pas retenue : «On travaille déjà à la construction de la prochaine bulle et du prochain krach. La Bourse, c'est bulle-krach-bulle-krach. Sans bulle, ni krach, la finance n'existerait pas. C'est comme dans l'industrie de l'armement, sans conflit, impossible d'écoulerles stocks.»

Marc Fiore