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Libération
Reportage

Dans le sillage digital de la ministre du Futur

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Numérique . Frédéric Beigbeder a regardé Nathalie Kosciusko-Morizet transformer la France en jeu vidéo.
par Frédéric Beigbeder
publié le 12 mars 2009 à 6h52

C'était rue Saint-Dominique, faubourg de Saint-Germain-des-Prés, dans les jardins du secrétariat d'Etat à la Prospective et au Développement de l'économie numérique. J'avais enfin réussi à semer les caméras de France 5 que Libé avait lancées à mes trousses. Le soleil ne réchauffait rien, diffusant une lumière hivernale, inutile. Dans une cour voisine, des enfants jouaient à la balle au prisonnier. J'essaie de me souvenir de cette demi-journée passée avec Nathalie Kosciusko-Morizet. C'était le 9 mars 2009, il y a si longtemps… ou peut-être hier, je ne sais pas.

Nathalie portait des bottes en daim noir, un foulard orange et rose, un manteau évasé d'aristocrate polonaise. Son chignon lui donnait de faux airs de marquis poudré XVIIIe quand elle dévalait les escaliers de son hôtel particulier reconverti depuis la Révolution en annexe des services du «PM» (Premier ministre). La ministre avait sept ans de moins que moi ; elle ressemblait un peu à Agnès Jaoui.

Vaisseau spatial. Je me souviens de sa voiture noire aux vitres teintées. D'une poche du fauteuil dépassait la tête d'une girafe en plastique appartenant à son fils. La ministre m'expliquait des choses compliquées : je n'osais pas lui dire que je ne comprenais rien. Je détestais le virtuel, je me fichais complètement de la révolution numérique, la crise mondiale me donnait envie de me réfugier dans le Pays basque : regarder paître les moutons des Pyrénées me semblait une réponse adéquate à l'augmentation