Associé senior de la banque privée genevoise qui porte son nom, Pierre Mirabaud, 61 ans, dirige l'Association suisse des banquiers depuis cinq ans. Pour Libération, il revient sur les pressions exercées par le G20 sur la Suisse pour qu'elle assouplisse son secret bancaire.
Comment expliquez-vous cette attaque frontale des Etats-Unis et de l’Union européenne contre la place financière suisse ?
La Suisse paie le prix de son succès : un tiers de la fortune privée transnationale est placé ici [soit 2 000 milliards de dollars, ndlr]. La mise au pilori dont nous sommes victimes relève bien davantage d'une guerre économique, livrée par d'autres places financières concurrentes, que d'une problématique fiscale. Le secret bancaire est un prétexte : on cherche d'abord à nous reprendre des parts de marché ! Et pour cela, on a fait endosser à la Suisse le rôle de coupable utile, de bouc émissaire, et peu importe l'hypocrisie. Les Britanniques, par exemple, feraient mieux de balayer devant la porte des leurs îles anglo-normandes plutôt que de nous faire la leçon. Par ailleurs, je constate que cette offensive intervient au moment où la plupart des grands Etats ont des soucis budgétaires importants : ils doivent financer leurs plans de relance. Des pays qui se retrouveront au G20 de Londres, début avril. Or la Suisse, huitième économie de la planète, n'est pas invitée. Le principal accusé ne sera donc pas autour de la table, il ne pourra même pas se défendre.
Pourtant, la réputation des banquiers suisses a pris un méchant coup. La pratique du secret bancaire n’est-elle pas devenue intenable ?
Pas du tout. Nous sommes un pays honorable, qui a signé des conventions de double imposition avec chacun de ses voisins et de nombreux autres