Ils ont le sentiment qu'on leur a volé jusqu'à leur sortie. L'usine a fermé mardi, en catimini. Sony craignait des dégradations. C'est donc devant des grilles cadenassées, sous la pluie, que les salariés du site de Pontonx-sur-l'Adour, dans les Landes, ont passé vendredi leur dernière journée de travail officielle. «Un baroud d'honneur» , comme ils disent, «pour faire nos adieux et réaliser qu'il va falloir tourner la page». Ils s'étaient donné rendez-vous de bonne heure, avaient tendu quelques bâches sous lesquelles s'abriter et une banderole proclamant «Sony nous a tués». Puis ils sont partis en cortège, chacun portant une croix sur l'épaule avec son nom, sa date d'entrée dans l'entreprise, et celle de cette vilaine journée durant laquelle ils porteront le deuil d'une époque enterrée.
«Amer». «Vingt ans, c'est une moitié de vie», murmure une ancienne employée de l'administration en s'essuyant les yeux. «Je suis très triste, et amer aussi» , confie le maire socialiste qui est venu se joindre à la marche. Il voit les 311 emplois perdus. Il voit aussi le départ d'une entreprise qui avait accompagné tout le développement économique de la localité. En 1983, lorsque Sony inaugure l'usine, Pontonx est un gros bourg rural de 1600 âmes en bordure de forêt. La commune a été choisie pour l'assemblage de cassettes vidéo VHS, puis, dans les années 1990, pour la fabrication des bandes. L'essor du site favorise l'arrivée de nouvelles pop