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Libération
Interview

«La souffrance mentale est taboue»

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Marie-José Hubaud, médecin, établit un lien entre mal-être et organisation du travail :
publié le 27 août 2009 à 6h52
(mis à jour le 27 août 2009 à 6h52)

Marie-José Hubaud a exercé pendant une trentaine d'années comme médecin du travail. Elle est l'auteure de l'essai Des hommes à la peine (1).

Que sait-on de la souffrance au travail ?

Elle est directement liée à l’organisation du travail et elle signe l’échec de cette organisation. Soit l’entreprise n’a pas pris en compte les signes précurseurs. Soit elle a fait preuve d’une intolérable indifférence. Ce problème de la souffrance au travail n’est pas suffisamment instruit. Ni sur le plan social ni sur le plan scientifique ou statistique. On sait qu’il concerne plus les femmes que les hommes et plus les ouvriers que les cadres. La souffrance résulte de situations concrètes très différentes. Elle peut naître d’un excès de travail ou, à l’inverse, d’une charge de travail insuffisante. D’une formation trop légère qui met le salarié dans une situation intenable, mais également d’une tâche qu’on lui confie très inférieure à sa qualification. La notion de reconnaissance de l’individu est centrale dans la souffrance : le manque d’autonomie, le sentiment de ne pas utiliser ses compétences, le sentiment de ne pas recevoir l’estime que l’on croit mériter… Quand le geste ne signifie plus rien, il y a usure de l’élan vital à bas bruit, jour après jour. Lorsqu’on ne donne pas au salarié les moyens matériels, temporels, organisationnels d’exercer sa tâche, on le place dans une situation d’échec permanent, on porte atteinte à sa dignité de travailleur, donc à son estime de soi, et partant, à sa santé mentale.

Pourtant, France Télécom a mis en place tout un dispositif pour repérer cette souffrance…

Est ce que l’entr