JEAN-PIERRE JOUYET Président de l'Autorité des marchés financiers

Ce sujet peut paraître un brin provocateur. Et pourtant, comment qualifier un espace où les capitaux et les services financiers s’échangent en toute liberté, sur des marchés de plus en plus fragmentés et qui, pour une part très substantielle, ne sont pas réellement contrôlés et opèrent en toute opacité ? Un espace où l’on ne sait toujours pas précisément qui achète, quoi, quand, combien de temps et avec quel argent, où l’application effective des règles communes diffère d’un Etat à l’autre, où les acteurs financiers se livrent une concurrence acharnée ? La désorganisation des marchés profite aux très grands acteurs financiers, non aux épargnants et aux entrepreneurs. C’est donc l’intérêt même des Européens d’y mettre vite bon ordre. Sans aller jusqu’au jardin à la française, nous pouvons déjà débroussailler. Les solutions sont connues. Certaines sont à l’œuvre. La priorité doit aller à l’application intégrale des recommandations de Jacques de Larosière : surveillance des risques systémiques, création d’une chambre de compensation européenne pour les dérivés de crédit, harmonisation du corpus des règles et pratiques sur les marchés financiers européens et création «d’autorités européennes de supervision». Le marché financier européen doit être élevé au même niveau de transparence et d’exigence que celui du marché des biens. C’est à cette condition que l’Europe pèsera dans la construction d’un