Une équipe de sociologues du CNRS, il y a vingt-cinq ans, rendait à la direction des Télécoms un imposant rapport de recherche intitulé : «Le devenir des cadres aux Télécoms». C’était le titre officiel, tout le monde savait que le vrai sujet était : le malaise des cadres aux Télécoms. L’enquête avait duré plus d’un an, des centaines de salariés de tout niveau, dirigeants et syndicalistes, polytechniciens de la puissante Direction générale des télécommunications (DGT), responsables du ministère des PTT avaient été interviewés aux quatre coins de France. Les résultats étaient éloquents et sans appel. Le malaise des travailleurs des Télécoms était très profond. Tous les symptômes qui sont d’actualité en 2009 étaient déjà visibles en 1982. En effet, ni l’administration de l’Etat ni les travailleurs des Télécoms n’étaient prêts à subir les révolutions technologiques et managériales qui s’annonçaient, et qui, d’une manière presque inéluctable, s’imposaient.
Il fallait accomplir à marche forcée au moins quatre ruptures radicales. Tout d’abord, «désintégrer» le vieux ministère des Postes et Télécommunications, en transformant la puissante DGT en France Télécom. Cela avait pour conséquence de changer le statut, mais sans éliminer une hiérarchie fondée sur la domination des polytechniciens et des énarques, et tout en gardant un statut privé. Le management moderne faisait alors son irruption fracassante dans le monde de la fonction publique, imperméable à l’époque à la notion de managem