De multiples enseignements peuvent être tirés de la crise majeure que le monde traverse depuis deux ans et demi : incapacité du marché à produire de la stabilité et propension à engendrer des inégalités ; contradiction d’un mode d’accumulation financière sans travail ; volte-face des banques, hier sauvées de l’abîme par l’Etat, aujourd’hui prêtes à dévorer la main qui les a nourries ; marchandisation délétère qui restreint l’espace commun du vivre ensemble. Ce qui n’a pas été assez souligné en revanche, c’est le rôle joué par la privatisation de la monnaie.
Après trois décennies de décrochage de la masse salariale par rapport à la productivité du travail, le crédit aux pauvres pour compenser leurs salaires bloqués et le crédit aux financiers pour spéculer ont créé une situation intenable. D’un côté, une surproduction qui touche tous les principaux secteurs industriels, de l’autre des banques centrales restreignant le crédit qui aurait irrigué l’économie réelle, mais très laxistes avec les facilités accordées à la finance pour restructurer et concentrer les entreprises (vive l’effet de levier !) et pour participer à la frénésie spéculative sur les marchés de gré à gré. L’exemple de la Banque centrale européenne (BCE) est caricatural : tout en affichant sa volonté de limiter la croissance de la masse monétaire à 4,5% par an (soit l’inflation et la croissance économique de la zone euro), elle a toléré jusqu’aux mois précédant la crise une progression de 11% à 12% l’an.
Les leçons