«Kerviel n'est pas Robin des bois, c'est le trader qui a perdu le plus d'argent au monde, il vivra et mourra avec ça.» Sans attendre la décision du tribunal correctionnel de Paris, le verdict de Jean - Pierre Mustier, son ex-patron à la Société générale, est sans appel : Jérôme Kerviel n'est qu'un menteur, qui serait de surcroît «malhonnête, déloyal et tricheur» ; indigne pour ces motifs de figurer au panthéon des hors-la-loi de légende.
Le soutier maudit peut-il se prévaloir du label envié de «Robin des Bois» ? La question mérite réflexion : n’est pas bandit d’honneur qui veut. Pour être un digne successeur du «Prince des voleurs» - à l’existence mystérieuse -, trois conditions sont nécessaires. D’abord s’opposer les armes à la main - l’informatique en est une - à une grande injustice. Selon la légende, le chef des brigands de Sherwood était un «bandit social» qui combattait une double oppression : la mainmise des seigneurs normands sur les terres des Saxons, et l’enrichissement éhonté des gens d’église au détriment des paysans. On a beau décortiquer les positions hasardeuses du bricoleur de la Générale, éplucher ses courriels et prêter une oreille attentive à ses explications, on n’entrevoit derrière ses détournements aucune révolte contre la puissance des banques, ni aucune dénonciation des gains immoraux générés par les «produits pourris» des maîtres de la finance. La seule injustice dont serait victime Kerviel : la maigreur de ses primes de fin d’année