Il est maintenant devenu banal de constater que les inégalités de revenu ont augmenté depuis au moins les années 1980 dans la plupart des pays développés. Si le phénomène concerne tous les pays ou presque, il ne s’applique pas avec la même intensité partout. Certains pays ont connu une augmentation très substantielle des inégalités (les pays anglo-saxons par exemple) alors que l’augmentation a pu être plus modérée dans d’autres pays.
Un indicateur fréquemment retenu pour apprécier les inégalités est la part du revenu total avant impôts et transferts obtenue par les 1% des revenus les plus élevés. Partant du point le plus bas, cette part est ainsi passée de 7% en 1983 à 8,2% en 2005 en France, de 6% en 1979 à 14,3% en 2005 au Royaume-Uni, de 7,7% en 1973 à 18,3% en 2007 aux Etats-Unis, de 4% en 1981 à 6,6% en 2006 en Suède (1)…
Mais l’augmentation des inégalités est-elle nécessairement une mauvaise chose, notamment pour les plus pauvres ?
C’est un lieu commun de l’argumentaire libéral : les riches ont bien le droit de s’enrichir du moment que cela ne nuit pas aux autres. Mieux, l’enrichissement des riches pourrait être favorable à la croissance, encourager et récompenser l’innovation et donc profiter au reste de la population, par un effet de diffusion progressive de la prospérité. Tout le monde connaît la version de cet argument proposée par John Rawls : les inégalités sont prétendument «justes» lorsqu’elles contribuent à améliorer le sort des plus démunis.
Qu’en est-il dans la