«Ras le bol.» Jocelyne, 63 ans, arrêtera de trier le courrier du rectorat de Lille en janvier. Pour avoir ses trimestres, elle aurait dû travailler «jusqu'à 79 ans, mais il faut qu'[elle] en profite». Elle rit. «Peut-être que dans cinq ou six ans je serai plus là.» Sa fille Valérie, 43 ans, infirmière anesthésiste à Seclin, dans la banlieue de Lille, ne se voit pas «au bloc» ou «d'astreinte, appelée plusieurs fois par nuit», à 62 ans. Nous sommes à Phalempin, dans un lotissement de la campagne lilloise, chez Valérie et son mari, comptable. Cuisine ocre, salon impeccable, rien qui traîne, carrelage blanc, deux canapés. Albin, 19 ans, étudiant en comptabilité et finance à la Catho de Lille, écoute sa mère et sa grand- mère. Il rentre à peine du foot, un peu crevé.
Valérie a prévu d'arriver à la retraite avec maison «payée» et voiture «neuve»,«pour être tranquille». Jocelyne : «Nous, à 40 ans, on ne pensait pas à tout ça.» Jocelyne est toujours locataire. Cette fonctionnaire, mère de quatre enfants, touchera bientôt «1 300 euros de retraite». Mais, «quand t'as payé un loyer de 500 euros, il te reste des clopinettes». Son mari était ouvrier à Fives-Cail-Babcock, ex-géant de la métallurgie à Lille. Elle a travaillé à 35 ans, quand le chômage partiel a commencé à frapper l'usine de son mari. «Mes parents se sont sacrifiés pour nos études», se souvient Valérie. Au début, des gardes d'e