Essoufflement ? Début d’une autre séquence ? Laquelle ? Cap sur Amiens (Somme), en pleine ébullition depuis la fin de la semaine dernière. Une zone industrielle bloquée puis débloquée fermement, et les étudiants qui rentrent dans la danse. Une habitude dans cette ville moyenne : l’université en est à son quatrième conflit en quatre ans, après le contrat première embauche (CPE) et les lois sur l’autonomie de l’université (LRU1 puis LRU2).
Amphi 600, murs jaunes, lino au sol, entre 300 et 400 étudiants, il ne reste qu'à jeter une allumette. Elle prend la forme de trois cheminots dont l'apparition embrase l'assemblée. Car la jonction éventuelle entre les salariés et les étudiants est la grande question du jour, dans la plus pure tradition des mouvements populaires qui emplissent, à l'évidence, les rêves d'une partie des travées. Voilà les trois cheminots, bras levés, poings tendus, coupant la chique aux - assez rares - orateurs antiblocage qui tenaient à préciser que «1789 était une révolution bourgeoise contrairement à ce qui a été dit».
Un colosse barbu aux cheveux longs prend le micro. En grève depuis quatorze jours. Une voix paisible, le silence s'impose : «Il y a douze ans, j'étais à votre place, on m'avait dit de faire des études pour avoir du travail. Voilà, je suis roulant, j'ai une hygiène de vie désastreuse, avec des horaires décalés. Profitez ! Ici, vous pouvez croiser des fils de dentiste, d'ouvrier, d'avocat, ce sont vos derniers moments à pouvoir échang