Professeur émérite à l’université de Bordeaux-IV, Henri Bourguinat n’a cessé de renouveler les mises en garde contre les risques de rupture du système financier. Dans un récent ouvrage (1), cosigné avec Eric Briys, il explique pourquoi la crise n’est pas finie. Entretien.
Comment jugez-vous le G20 ?
On peut se demander si l’Amérique n’a pas trouvé, avec le nouvel assouplissement monétaire, le moyen de faire s’apprécier le yuan en faisant elle-même baisser le dollar. La réalité, c’est que les Etats-Unis et la Chine sont désormais dans un face-à-face bien différent du dialogue Chine-Amérique qu’on avait entrevu.
Pourquoi parlez-vous de «marchés de dupes» ?
Depuis le début de la crise financière, il a beaucoup été question de régulation. En juillet, le Congrès américain a adopté une loi pour mieux contrôler Wall Street. On s’y attache à Bruxelles ou à Genève, avec Bâle III. Mais le diable se cache dans les détails.
Ces régulations ne sont pas à la hauteur ?
Non. La titrisation, par exemple, n’a pas été remise en cause. Cette technique financière, qui consiste à transformer les crédits des banques en titres financiers, est toujours à l’œuvre. Or, c’est elle qui a déclenché la crise financière de 2007. Une directive de Bruxelles prévoit que les banques devront conserver 5% des risques qu’elles créent par l’ouverture de leurs crédits. C’est misérable. Il fallait 30%.
Rien n’a bougé ?
On ne peut pas dire cela. Il y a de petites avancées. Mais ce qui inquiète, c'est le renforcement des concentrations bancaires. On progresse dans le règne du too big to fail, selon lequel les banques trop importantes ne pourra