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l est des aides qui peuvent être perçues comme des humiliations. Surtout en Irlande, pays fier de son indépendance arrachée aux Anglais et qui passe, en l'espace de trois ans, de premier de la classe à bonnet d'âne. «Après être passés sous la coupe des banques et d'un gouvernement qui a taillé dans les dépenses publiques, on passe sous la coupe de Bruxelles ou de Londres, c'est tout simplement insultant, s'agace ainsi Connie, étudiante en économie internationale. On lâche notre souveraineté en rase campagne, c'est un cauchemar qui n'en finit pas.» Ce sentiment, Peadar Kirby ne le partage pas. «Ce n'est pas le problème, confie ce professeur de sciences politiques de Limerick, auteur de Celtic Tiger in Collapse («l'effondrement du tigre celtique»). La vraie question, c'est qu'on s'aperçoit que le gouvernement a été d'une complaisance extrême avec les banques et a grugé sur les chiffres des pertes. Et que l'aide européenne s'impose.»
C'est surtout la colère qui submerge Kieran Allen, qui rejoint l'avis de Kirby. Ce sociologue de l'université de Dublin fustige «le capitalisme casino à l'irlandaise» depuis plus de dix ans. Il a écrit dès 2005, en plein «miracle économique», The Corporate Takeover of Ireland («la prise de contrôle des entreprises sur l'Irlande»). «Non, je ne ressens pas un sentiment d'humiliation, résume-t-il. Mais plutôt un sentiment de colère face aux mensonges.» Colère contre «